Le décret « portant diverses dispositions relatives à l’organisation du travail des membres du personnel de l’enseignement » prévoit la possibilité de créer des postes visant à des « missions collectives » afin de répondre à la réalité de chaque établissement (https://www.gallilex.cfwb.be/document/pdf/46287_000.pdf). 

Une liste de missions y est suggérée.  On y trouve, entre autres, un délégué en charge à la confection des horaires, un autre en charge de la coordination des enseignants référents et également un poste de délégué en charge de la médiation et de la gestion des conflits entre élèves.

Cette disposition est une opportunité intéressante d’étendre la médiation à l’ensemble des établissements scolaires et de permettre ainsi, aux élèves et aux équipes éducatives, de vivre l’expérience de la médiation.  Une expérience forte dans une institution scolaire qui travaille à éduquer à la démocratie.  Car la médiation, comme le titre Jacquet Faget, est un « atelier silencieux de la démocratie », un atelier où l’on va à la rencontre de soi et de l’autre et dans lequel on apprend le dialogue constructif.

Comment faire en sorte que cette proposition soit une réelle opportunité pour nos écoles ?

Tout d’abord, il est essentiel que la personne qui sera déléguée à la « mission » de médiation soit formée à la médiation…  Une évidence, me diriez-vous ! Pourtant, force est de constater que beaucoup pense encore que la médiation est à la portée de tous.  Mettre des personnes autour d’une table et les amener à discuter semble facile.  Ne fait-on pas de la prose sans le savoir ?   Et pourtant… être médiateur est un métier à part entière, qui demande un positionnement précis et exigeant, et une méthode maitrisée. 

Le respect du positionnement du médiateur aura également un impact décisif quant au succès de la médiation à l’école.  L’institution scolaire doit permettre au médiateur d’établir sa posture de tiers indépendant, neutre et impartial.  Ce qui implique une indépendance par rapport au système hiérarchique et disciplinaire de l’établissement.  A moins d’être au clair par rapport à sa posture, il peut être délicat pour un médiateur d’être à la fois éducateur ou professeur.  La « double casquette » peut mettre à mal son positionnement et peut amener à une perte de confiance des bénéficiaires.  La médiation ne peut fonctionner que lorsque son indépendance, sa neutralité et son impartialité sont garanties. Et qu’il est perçu comme tel.

L’opportunité offerte par ce décret d’instituer des médiateurs scolaires selon les besoins spécifiques de l’école risque, par ailleurs, de voir se développer des projets disparates ; en laissant la définition de la médiation et du travail du médiateur aux P.O. ou aux directions.  Au lieu de renforcer la professionnalisation de ce nouveau métier, nous risquons d’aller vers un éclatement des pratiques et la perte des fondements de la médiation.  Un autre écueil serait également l’isolement du médiateur dans son projet spécifique avec peu ou pas de possibilités d’échanger sur sa pratique et les difficultés rencontrées, avec une équipe ou des collègues médiateurs.

Nous pensons que l’instauration d’un délégué à la médiation doit faire l’objet d’une vigilance accrue afin qu’elle soit une réelle opportunité de démocratie et de mieux-vivre ensemble à la communauté scolaire.  Des balises claires, telle que l’obligation de formation spécifique, d’un profil de fonction du médiateur et du respect des règles professionnelles et déontologiques, peuvent être un gage de qualité d’une médiation professionnelle au sein de nos écoles.